En matière de production électrique, il est important que l’offre du marché corresponde à tout moment à la demande. Pour répondre aux besoins électriques d'un pays, on ne sollicite pas les unités de production au hasard mais au contraire dans un ordre bien précis appelé merit order. Zoom sur cette mécanique et ses répercussions sur le marché de l'énergie électrique.
Qu’est-ce-que le merit order exactement ?
Le domaine de l'énergie électrique mérite souvent l'apport de
plus d'informations. On appelle « merit order » (à traduire par « ordre de mérite), un concept utilisé dans l’industrie de l’électricité pour déterminer un ordre de priorité pour l’utilisation des différentes sources de production électrique afin de répondre aux besoins. On peut comparer cela à une méthode d’
estimation économique dont le but est de classer les diverses options de production d’électricité en fonction de leurs coûts marginaux de production. On entend par coût marginal de production électrique, l’augmentation du coût total de la production d’une unité électrique (MWh) supplémentaire. Cette augmentation résulte généralement de coûts amenés à fluctuer comme celui des matières premières, de la main-d’œuvre, des règlementations environnementales etc. En effet, au sein d’un système électrique, les coûts de fonctionnement des diverses sources de production d’électricité ne sont pas les mêmes. Les coût marginaux d’une centrale thermique à combustibles fossiles (gaz naturel ou charbon) qui sont liés à l’achat du combustible sont plus élevés que ceux d’une centrale nucléaire, principalement induits par la maintenance et l’exploitation ou ceux d’une source d’énergie renouvelable comme l’éolien ou le solaire dont les coûts marginaux restent très bas une fois les installations construites. Par exemple, le coût marginal pour une centrale nucléaire est estimé à 30 alors qu’il se monte à 86 pour une centrale à charbon et 70 pour le gaz naturel.
En comparaison, la géothermie et l’éolien ont des coûts marginaux égaux à zéro. La mécanique du merit order consiste donc à classer ces différentes sources de production d’électricité du coût marginal le plus bas au coût marginal le plus élevé. Lorsque les besoins en électricité augmentent, les unités de production sont alors activées en tenant compte de cet ordre de mérite c’est-à-dire en commençant par les sources les moins chères. Ce mécanisme permet donc de minimiser les coûts globaux de production d’électricité et d’optimiser l’utilisation des ressources disponibles. On utilise généralement la règle du merit order pour prendre des décisions en matière de planification et de politique énergétique. L’usage du merit order s’avère tout particulièrement intéressant pour déterminer quelles sources de production d’électricité doivent être ajoutées au réseau ou quelles technologies nécessitent de bénéficier de mesures de soutien. En période de faible besoin électrique, le système se reposera sur des unités de production à coûts marginaux peu élevés (énergies renouvelables notamment). En revanche, pendant les périodes où la consommation électrique est élevée, le système fait appel à des unités de production aux coûts marginaux élevés ce qui impacte sur le prix de l’énergie. De même, grâce à la prise en compte des coûts marginaux, le merit order contribue à favoriser les sources d’énergie les moins coûteuses et les plus compétitives tout en considérant aussi d’autres facteurs importants comme l’impact environnemental et la sécurité de l’approvisionnement.
Les avantages liés à la pratique du merit order
Le mécanisme du mérit order tel qu’il est utilisé aujourd’hui sur le marché de l’électricité présente plusieurs avantages :
La flexibilité et la diversification
Lorsque le besoin en électricité est faible, seules les sources les moins coûteuses sont utilisées, tandis que lors de pics (effets saisonniers notamment), des sources de production plus coûteuses peuvent être activées. Cela permet d'adapter la production aux fluctuations de la
demande, d'assurer la stabilité du réseau électrique et la sécurité d’approvisionnement sur tout le territoire.
Il favorise l’usage d’énergies renouvelables
Le merit order joue un rôle au regard de la
transition énergétique car il favorise l'intégration des sources d'énergie renouvelable, telles que l'éolien et le solaire, dans le mix énergétique et participe ainsi à la diminution des émissions de CO2. Cela encourage l’investissement dans des moyens décarbonés.
Il aide à réduire les coûts de l’énergie
Le merit order permet de minimiser les coûts de production d'électricité. En utilisant en premier lieu les sources de production les moins chères, le système électrique peut fonctionner de manière économiquement efficace. Cela permet de réduire les coûts pour les consommateurs d'électricité et d'optimiser l'utilisation des ressources disponibles. Pousser les prix de l’électricité vers le bas représente un avantage important pour les consommateurs et les industriels.
Il apporte de la transparence et de la compétitivité sur le marché
Le mécanisme du merit order apporte de la transparence dans le processus de production d'électricité. En classant les sources de production en fonction de leurs coûts marginaux, il crée une structure de marché compétitive. Cela encourage la concurrence entre les différents acteurs du marché de l'électricité et favorise l'efficacité économique.
Il s’adapte aux nouvelles technologies
De part son côté flexible, le merit order s’adapte aux évolutions technologiques. Lorsque de nouvelles technologies de production d'électricité deviennent compétitives en termes de coûts, elles peuvent être intégrées dans l'ordre de mérite, encourageant ainsi l'innovation et le développement de nouvelles solutions énergétiques.
Les inconvénient liés à l’utilisation du merit order
Malgré les nombreux avantages répertoriés ci-dessus, certains points du merit order font cependant l’objet de critiques.
Des risques pour la sécurité d’approvisionnement
Le merit order privilégie généralement les sources de production les moins chères, ce qui peut entraîner une plus grande dépendance à certaines technologies ou sources d'énergie. Si la part des sources variables comme l'éolien et le solaire devient trop importante dans le mix énergétique, cela risque de poser des défis en termes de stabilité du réseau et de sécurité d'approvisionnement. La France ne pouvant pas assurer toute sa consommation via les énergies renouvelables, il lui faut donc miser sur un minimum de capacité au niveau des autres sources de production d’électricité. Le problème est qu’un contexte aussi incertain qui tient compte des coûts marginaux de production risque de décourager tout investisseur dans une centrale à gaz ou à charbon.
La volatilité des prix et une faible visibilité sur le long terme
Pour fixer le prix de l’électricité on se base sur le merit order ce qui impacte inévitablement le
day-ahead, c’est-à-dire la négociation des coûts de l’énergie électrique au jour le jour. D’une manière générale, le merit order crée une totale absence de visibilité, une grande incertitude. Ce flou dans l'
estimation peut décourager à investir dans des infrastructures longues à rentabiliser mais qui seraient pourtant nécessaires au parc de production électrique français.